1) Stéréotypes

B) Les stéréotypes de la beauté

Lorsqu’on dit à une adolescente, qu’elle ressemble à une femme maintenant, qu’est-ce que mannequincela veut dire ?

     La femme est représentée par plusieurs images : séduction, mystère, élégance,  sophistication… Physiquement, le stéréotype même de la femme serait la femme blanche,  occidentale, aux yeux clairs et aux cheveux lisses et blonds.
     Mais des femmes correspondant véritablement à ces critères, on n'en trouve que dans les films. Dur d’essayer de se rapprocher de cet idéal virtuel. Même s’il a suscité beaucoup d’envieuses, peu de femmes l’atteignent.
 En effet, dans les magazines, 50% des femmes sont blondes alors qu'en France, elles sont  seulement 10% (¹). Ceci a attisé la jalousie et créé un stéréotype : celui de la blonde à forte  poitrine et écervelée. Certaines célébrités en profitent et mettent en avant ces caractéristiques pour se faire connaître ; exemple avec Eve Angeli, qui était brune au départ, et qui joue de cette image. Le vecteur phare aujourd'hui de ce stéréotype, ce sont les blagues sur les blondes. Ces blagues discriminatoires choquent moins que les blagues racistes qui sont tout aussi injurieuses (cf. reportage).

femmes à plateaux
    Le stéréotype de la beauté est une norme, il est alors relatif à la société.
 Par exemple, en Afrique les femmes enveloppées sont plus appréciées puisqu’elles sont  considérées comme bien nourries, bien portantes, et donc aisées.
    Paradoxalement, dans les sociétés occidentales où l'on ne meurt pas de faim, c'est le  modèle de femme très maigre qui est le plus prisé. On voit donc que le stéréotype idéal  de la beauté est un idéal inaccessible.
    Autre exemple, celui des femmes à plateaux en Ethiopie, qui symbolisent un grade  social élevé et qui sont une marque d'esthétique. Pour nous occidentaux, cette beauté  paraît barbare et loin de nos canons. Mais les occidentaux d'il y a quelques siècles auraient également trouvé laids les canons de beauté actuels.
    La beauté est donc relative à l'espace temporel et géographique.



Stéréotypes de la beauté de la femme dans l'histoire :

On peut dire que l’apparence (les habits, la coiffures etc.) différencie depuis toujours les classes sociales.
De plus, dans la littérature, les histoires d'amour tournent toujours autour de la beauté, où les hommes tombent amoureux d'une femme uniquement pour son apparence flatteuse.
Retraçons les différents stéréotypes de la beauté chez la femme au cours des siècles :

Aphrodite
Dans l’Antiquité : prendre soin de son corps était un art de vivre pour les grecs et les
romains : mens sana in  corpore sano (= un esprit sain dans un corps sain). 
    Les grecs de l’époque classique pensaient que leurs sculptures étaient le résultat d’une synthèse exprimant beauté du corps et beauté de l’âme (cf. statue Aphrodite ►). Les deux beautés étaient donc étroitement liées. De plus, les dimensions des statues ne correspondaient aux corpulences réelles. Pour les Grecs, avoir un corps d'athlète allait de pair avec le fait d'être cultivé et vertueux, d’où l’expression Kalos kagathos qui signifie « beau et bon ».                                                                                                      
Au Moyen-âge : dans les contes et récits médiévaux, les princesses ou les fées étaient belles et avaient donc une âme vertueuse et noble, tandis que les sorcières étaient repoussantes et par là même méchantes. Par exemple, dans Tristan et Iseult, le nain Frocin est difforme et hideux, donc sournois et félon. On peut généraliser avec des contes comme Cendrillon, Peau d'âne etc. Les défauts physiques sont aujourd'hui encore perçus comme une imperfection morale.
    Tout au long du moyen-âge, la religion a eu une influence très forte sur la beauté. Au nom de la morale, on cachait le corps pour ne laisser voir qu’un visage impassible au teint blafard. Cette influence faiblit à la renaissance, la preuve avec le portrait dénudé d’Agnès Sorel, surnommée « la Dame de beauté » qui appliquait tous les matins sur son visage un masque contenant de la cervelle de sanglier, des vers de terre et de la bave d’escargot.
    La femme idéale à cette époque avait la silhouette mince, gentilment incurvée en forme de S, la tête légèrement inclinée en avant, la poitrine effacée, le ventre et les hanches projetés en avant."Les Trois Grâces" de Rubens

De la Renaissance au début du XXème : les femmes qui étaient belles étaient rondes, aux formes harmonieuses, au teint clair captant la lumière, presque semblables à des statues. Il en est ainsi des tableaux de Rubens et de Renoir où elles sont potelées (cf. Les Trois Grâces de Rubens ►). A l’époque, ces femmes étaient enviées car considérées comme de bonnes mères reproductrices avec leur large bassin. Elles devaient cependant porter des corsets pour s’amincir la taille et faire ressortir la poitrine et les hanches.

Au XXème siècle : Les critères de beauté ont beaucoup évolué au cours de ce siècle : dans les années 30, la mystérieuse Greta Garbo, dans les années 60, la femme chic comme Jacqueline Kennedy ou sexy comme Marilyn Monroe, puis dans les années 70, ce sera la femme frêle comme le mannequin Twiggy et enfin, dans les années 80-90, les fashion victims.

Greta GarboJacqueline KennedyMarilyn MonroeTwiggy
A partir des années 60, dans cette société dominée par l'égo, le  corps aurait acquis une souplesse relative à celle qu'ont acquise les  mentalités. On veut se montrer libre, mais pour cela on doit subir  amincissements et autres : la liberté est normée.
 Tous ces changements ont valu à ce siècle d’être considéré comme le  siècle du corps. Ceci peut s’expliquer par le passage d’une société  de  production à une société de consommation, où le plaisir a pris
une place importante dans la vie des gens. Cet engouement se traduit par une explosion des dépenses de santé et de loisirs, et par l’apogée des valeurs de la jeunesse liée à la génération des babyboomers.
De plus, avec la montée du féminisme dans les années 60, les revendications de la ré-appropriation du corps des femmes révèlent des interrogations sur les rôles sociaux des hommes et des femmes.body art
Ce changement de la place du corps dans la société peut aussi s’expliquer par le vieillissement de la population occidentale et le développement du souci de santé qui lui est relatif. Il peut également s'expliquer par le progrès technologique (retouches photos…) et médical (chirurgie…).
Puis des magazines commencent à proposer des tests pour connaître sa personnalité grâce à son apparence : la peau révèlerait nos états d'âme, des raideurs musculaires révèleraient notre stress et nos secrets... En connaissant notre corps, en écoutant ce qu'il a à nous dire, on pourrait mieux surmonter ce qui ne va pas.
Il y a aussi l’apparition du « body art » ou art corporel, en 1950 avec Pierre Molinier : le corps devient même un matériau.

A partir des années 80 : développement des pratiques de remise en forme, où les femmes sveltes sont mises en avant. Il semble possible de modeler son corps à l'infini et finalement de modeler sa nature première. L'effort devient un outil indispensable pour arriver à ses fins esthétiques. Apparaissent alors des dossiers « beauté forme » dans les magazines féminins, où les femmes peuvent trouver des conseils ardus et exigeants pour maigrir avant l'été.

cours fitness
     La maigreur est alors le stéréotype idéal. La transformation de soi  est donc devenue une pratique obligée et entraîne un enjeu  d'identité. L’exemple le plus flagrant est celui de la femme qui suit  puis dépasse la norme corporelle dominante, elle est étiquetée  comme anorexique, et surveillée par la famille, les pairs, l'école, les  médecins etc. pour ne pas retomber dans la déviance. La déviance  inverse, l'obésité, est également stigmatisée et sanctionnée  négativement par la société.
 
Mais on a réussi à modérer cette maigreur, et on revient petit à  petit à un stéréotype un peu plus pulpeux, mais qui ne reflète quand même pas du tout la corpulence moyenne des femmes, qui est de 63kg pour 1m63 pour les Françaises (¹). Par exemple, en Espagne, les mannequins n'ont pas le droit d'être anorexiques. Cependant, les stéréotypes ont une influence de plus en plus importante, ce qui plonge la société dans un mal-être.

Aujourd’hui, physiquement il y a plusieurs catégories dont ces 2 :
  • En sur poids (en France, en 2003 selon l'INSEE, 21,2% des femmes)
  • En sous poids (en France, en 2003 selon l’INSEE, 6,7 % de femmes) (²)
On nous demande d'être dans la catégorie où il y a très peu de personnes, celle qui est la moins accessible. Et pourtant, la grande majorité des femmes cherche à correspondre à ce même stéréotype. La beauté est donc normalisée, tout le monde veut être pareil.
C’est l’uniformisation, un seul corps réduit à son idéal. On ne touche plus, on ne fait que regarder.
Les sociétés idéalisent leurs représentations, ces idéaux sont presque systématiquement liés à "l'inaccessible" relatif à la société elle-même. Ils ne représentent pas la réalité ; le réalisme n'intéresse pas.
Mais il est bon de noter que chaque société choisit, plus ou moins consciemment il est vrai, ses modes de transmissions et les représentations qui les accompagnent.

Ces nouvelles normes de la beauté font naître une gamme de professions telles que les chirurgiens esthétiques qui font partie de la couche sociale supérieure, qui est celle qui profite de stéréotypes si exigeants. Les victimes seraient donc les personnes des classes moyennes qui n'exercent pas ces métiers. Les publicitaires et les vendeurs de vêtements font également fortune avec ces modèles si fins et si parfaits (cf. vidéo).


(¹) FOUGERE I., GERMAIN I. et HENRY N., 18 ans Respect les filles !, la documentation Française.
(²) BERSIER E., KARADANIZ S., GUERRERO J. TD-TP Sciences et techniques sanitaires et sociales 1e ST2S. Masson, 2007. p27